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2. Affaires socioéconomiques

Interview de Carine Stassen


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Au regard des mesures mises en place par l’État fédéral pour renforcer la protection des ménages (tarif social spécifique et Fonds énergie), les ordonnances électricité et gaz de la Région de Bruxelles-Capitale ont été mises en œuvre pour assurer la protection du consommateur résidentiel bruxellois. Dans ce contexte, le service des Affaires socioéconomiques de BRUGEL veille au bon fonctionnement des différentes mesures régionales et propose au Gouvernement des pistes d’amélioration afin de garantir l’accès à l’énergie à tous les Bruxellois.

Protection du consommateur résidentiel

En 2018, la protection du consommateur bruxellois dépendait toujours des quatre leviers cardinaux que sont l’obligation de faire offre pour les fournisseurs, des contrats d’une durée de trois ans, l’octroi du statut de client protégé régional sur une base volontaire et l’impossibilité de résilier un contrat en cours sans la décision d’un juge de paix. « Au cours de cette année, la protection du consommateur a été étendue aux clients qui se retrouvent en fin de contrat en période hivernale », précise Carine Stassen. « Le cas échéant, leur compteur ne peut plus être coupé durant cette période et ils basculent automatiquement chez SIBELGA. »

De plus en plus de contrats non renouvelés

Si la législation bruxelloise précise que les fournisseurs ont l’obligation de proposer un contrat d’une durée de trois ans, rien ne les contraint à le renouveler. En 2018, de nombreux clients ont ainsi vu leur contrat prendre fin sur base des dispositions contractuelles après trois ans.

« En 2018, nous avons constaté que certains fournisseurs d’énergie avaient tendance à généraliser cette pratique afin de contourner les décisions de justice de paix », souligne encore Carine Stassen. « Le phénomène a pris une telle ampleur que cette année, le nombre de coupures dues à une fin de contrat a été plus important que le nombre de coupures dues à une décision de justice de paix. Nous avons également constaté que certains fournisseurs avaient tendance à analyser les données des consommateurs pour établir des profils et ainsi repérer les mauvais payeurs chroniques. »

Cette pratique des fournisseurs est présente seulement à Bruxelles et il est à noter que la fréquence de celle-ci peut varier fortement suivant la politique commerciale du fournisseur.

Suite à cette pratique, un nombre important de ménages se sont vu notifier une fin de contrat en 2018, alors qu’ils n’avaient pas pris de dispositions auprès d’un autre fournisseur.

Étude comparative

Forte de ce constat, BRUGEL a réalisé une étude comparative reprenant toutes les offres proposées par les fournisseurs du pays. Il en est ressorti que par rapport aux deux autres Régions, les propositions tarifaires des fournisseurs pouvaient être plus élevées sur le marché bruxellois.

« Selon les fournisseurs interrogés, le cadre régulatoire de la politique de protection du consommateur bruxelloise est devenu trop contraignant et entraîne de trop gros risques financiers pour eux », souligne Carine Stassen. « D’où cette tendance à se désengager du marché et à proposer des offres différenciées par rapport aux autres Régions. »

Avec une ordonnance inchangée en 2018 et un cadre régulatoire prévoyant de nouvelles obligations de service public pour les fournisseurs, le marché risque d’être encore plus tendu les prochaines années.

Répercussions de la faillite d’Anode

La faillite d’Anode, responsable d’équilibre, a également fortement influencé la dynamique du marché bruxellois en 2018. À la suite de cette défaillance, certains petits fournisseurs se sont tournés vers d’autres opérateurs qui n’ont pas pu leur proposer les mêmes conditions. « Cette faillite risque de fragiliser les petits fournisseurs qui ne bénéficient plus des protections qu’offrait Anode », explique Carine Stassen. « D’autant que cet épisode a également eu un impact sur les offres tarifaires de certains fournisseurs qui proposent désormais des indexations trimestrielles du prix de l’énergie. » Cette faillite de l’agrégateur couplée à l’augmentation des tarifs sur le marché de gros a eu un impact important sur la facture du client avec une augmentation moyenne de 12 % pour l'électricité et 18 % pour le gaz au dernier trimestre 2018.

À côté de cette faillite, deux autres événements ont également modifié le paysage du marché bruxellois. En effet, l’année 2018 a également vu la cessation d’activité du fournisseur BELPOWER ainsi que l’acquisition de POWEO par le groupe TOTAL.

Différentes variables ont donc eu une portée systémique qui a influencé le marché bruxellois dans son ensemble. « Sur ce marché où seuls quatre fournisseurs proposent encore des offres aux clients résidentiels sans restriction, le retrait d’un seul – même mineur – peut avoir de lourdes conséquences sur l’équilibre du secteur », confirme Carine Stassen. « Et comme l’offre de fourniture se réduit progressivement, beaucoup de clients précarisés risquent de ne plus pouvoir retrouver de contrats parce qu’ils ont notamment déjà contracté des dettes auprès d’autres fournisseurs. »

Vulnérabilité énergétique

En Région de Bruxelles-Capitale, une personne en situation de dette a la possibilité de bénéficier du statut de client protégé et du tarif social régional.

En 2018, la proposition de BRUGEL concernant la suppression du limiteur de puissance pour les clients protégés a été acceptée par le législateur. Suite à cette adaptation, le nombre de clients protégés a connu une hausse sensible, passant de 1 800 clients protégés mi-2018 à 1 943 en fin d’année. Cette augmentation a surtout été ressentie au sein de BRUGEL et dans une bien moindre mesure auprès des CPAS.

« Nous avons constaté que beaucoup de CPAS bruxellois n’ont pas le réflexe d’activer cette protection », explique Carine Stassen. « Et comme ce sont les CPAS qui sont en contact avec la clientèle vulnérable, le recours à cette protection reste relativement modéré. Ce chiffre représente en effet moins de 0,4 % des clients bruxellois. Quand on considère les 70 000 ménages en situation de précarité énergétique et les plus de 27 000 clients équipés d’un limiteur de puissance, le delta reste impressionnant. »

D’autant qu’en 2018, le nombre de clients hivernaux est passé à 537, soit une augmentation de 108 % par rapport à l’année précédente. Dans ce contexte, BRUGEL pronostique qu’il y aura plus de 1 000 clients hivernaux fin mars 2019, soit autant de coupures potentielles à l’issue de la trêve hivernale.

« Cette augmentation importante est la conséquence de la modification de l’ordonnance qui a donné à SIBELGA une nouvelle obligation de service public portant sur l’alimentation, durant la période hivernale, des ménages dont le contrat n’a pas été reconduit par le fournisseur et qui n’ont pas resigné de contrat auprès d’un nouveau fournisseur » précise Carine Stassen. « Cette alimentation est facturée au tarif social. »

Obligations de service public

En 2018, les obligations de service public à charge de SIBELGA sont restées constantes et concernent toujours les limiteurs de puissance, les clients protégés et les clients hivernaux. Aucune obligation supplémentaire n’a en effet été confiée au GRD, si ce n’est celle d’alimenter les fins de contrat en période hivernale.




Priorité à la protection du consommateur vulnérable !

Carine Stassen,

responsable du service Affaires socioéconomiques au sein de BRUGEL.


EDF-Luminus : retrait programmé

En 2018, EDF-Luminus - le troisième fournisseur de la Région de Bruxelles-Capitale - s’est progressivement désengagé du marché bruxellois (sans pour autant abandonner certains profils de clients) en ne renouvelant pas certains contrats et en ne proposant plus qu’une seule offre. Celle-ci, la moins attractive du marché, n’est de plus accessible que de manière indirecte. L’offre n’est disponible qu’en magasin.

Vulnérabilité énergétique

Le nombre de clients protégés a connu une hausse sensible, passant de 1 800 clients protégés mi-2018 à 1 943 en fin d’année.